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L’Allemagne ? La Suisse ? La France ?

mercredi 3 avril 2013, par François Bunner

Le "Rhin supérieur" est une source inépuisable d’inspiration pour les partisans du « oui ». Ils en tirent des arguments pour les estrades qui ne résistent pas une seconde à un examen un peu sérieux.

Dans les réunions publiques, les "fusionistes" essaient constamment de tirer parti de l’exemple de nos voisins allemands du Land du Bade Wurtemberg, disant que c’est parce que ce dernier est plus grand que nos départements, parce qu’il a fusionné en 1952, qu’il réussit mieux que nous et que nous devrions en faire autant. Mais l’exemple suisse qu’ils tirent aussi de leur chapeau dit l’exact contraire : les cantons suisses frontaliers sont petits et pourtant le canton de Bâle est encore plus riche que le Bade Wurtemberg ! Et la Suisse n’est même pas dans l’Union européenne ! Va comprendre Charles !?

Mesdames, Messieurs les "fusionistes", il y a de la confusion dans vos arguments : vous nous comparez à nos voisins, qui sont quand même si différents de nous et en plus vos exemples sont contradictoires. Plus petit ou plus grand ? Il faut choisir, la Suisse ou l’Allemagne, Bâle ou le Pays de Bade ?

En fait, ces comparaisons n’ont aucun sens. Le Bade Wurtemberg n’est pas prospère comme il l’est parce qu’il a fusionné de 1952, mais parce qu’il est allemand et parce que les Allemands ont faim, ils se battent pour leur économie, ils veulent conquérir, ils veulent s’imposer en Europe, imposer leur façon de faire. Les Suisses veulent eux aussi continuer d’exister et fidèles à leur histoire, depuis le moyen-âge, ils persistent fièrement à défendre leurs intérêts, indépendants de toutes les modes politiques de l’Europe.

Et nous, nous en sommes où nous en sommes, parce qu’en France on est paisible, on voudrait vivre paisiblement avec les autres, en plus on nous a dit que la France était certes notre histoire, mais qu’elle était désormais trop petite et que l’Europe était notre avenir — en tout cas nos zélites en sont convaincues — alors on a mis nos rêves et nos moyens au pot commun de l’Europe et on attend qu’il se passe quelque chose… Si les autres le veulent autant que nous, ça finira bien par arriver… Mais ça n’arrive pas du tout et chacun sent bien que dans ce contexte la France s’enlise, s’englue dans des problèmes qu’elle n’arrive plus à résoudre.

- Là où les Allemands ont raison c’est quand ils regardent le monde tel qu’il est, un lieu de compétition économique où on ne fait pas de quartier, mais au lieu de coopérer ils font la guerre économique au reste de l’Europe, sans pitié, et ça c’est très grave.
- Là où les Suisses ont raison c’est quand ils défendent leurs intérêts sans s’embarrasser de discussions idéologiques. Mais ils sont un paradis fiscal et ça c’est moche.
- Là où les Français ont raison, c’est dans leur volonté de vivre paisiblement avec leurs voisins et le monde, malheureusement ils n’ont pas le pouvoir de transformer ces voisins et le monde en aimables partenaires comme ils les aimeraient et donc nous nous faisons lentement distancer et ça, si ça dure, c’est dangereux.

Mais ce qui est tragique, c’est que nos dirigeants et beaucoup de nos concitoyens dont la vie est encore facile semblent préférer ce doux rêve à la confrontation avec les choses telles qu’elles sont.

Et pour comprendre cette affaire de la fusion des collectivités alsaciennes, il faut comprendre que c’est face aux conséquences de ces illusions, qui rend la France pusillanime et velléitaire — et dont la crise est une conséquence qui s’est mise à frapper plus durement l’Alsace depuis 2009 — que les présidents des trois collectivités alsaciennes se sont mis en tête de trouver une solution tout seuls, parce que la pression des voisins est plus sensible en Alsace.

Ils ajoutent ainsi une faute politique à leurs erreurs précédentes.